Nouvelle présidence du CAL – Le mot du Past-Président

Chère Véronique,

Chères amies, chers amis,

Mon mandat de président a pris fin. Je m’adresse à vous pour souligner une dernière fois, bénévoles et permanents, l’immense travail que vous accomplissez.

Le mouvement composé d’hommes et de femmes sincèrement attachés à nos valeurs de liberté, d’égalité et de solidarité agit, débat, bouscule, innove, transgresse et propose à travers ses associations, ses régionales et le CAL communautaire. Militants, nous savons que rien n’est acquis. Que la réalisation de l’idéal laïque exige rigueur, détermination et persévérance.

À chacune et chacun, merci.

Au cours des six dernières années, les chantiers furent nombreux.

Relevons parmi ceux-ci, la défense des migrants. Étrangers voyageurs méprisés en dignité et traités de façon injuste. Fiers de nos actions solidaires, de nos revendications pour la régularisation de leur situation, premiers à nous opposer au projet des visites domiciliaires, souvenons-nous que la solidarité n’est pas un crime, mais un devoir.

Épinglons notre combat permanent pour l’égalité des hommes et des femmes. Pour le plein exercice de leurs droits. Pour un féminisme universaliste. Pour une dépénalisation de l’interruption volontaire de grossesse. La législation évolue et nous y contribuons largement.

Les plus vulnérables, les plus démunis, les détenus ou encore les toxicomanes ont aussi occupé le cœur de nos préoccupations. C’est que la dignité humaine ne s’accommode pas de situations où les droits fondamentaux seraient moins accessibles à certains qu’à d’autres.

Quant à ceux qui font choix de mourir dans le respect de leur dignité, ils ont plus que jamais pu compter sur notre soutien. Les conditions de la mort peuvent résulter d’un choix de vie. Pas à pas, nos propositions font adhésion.

L’instruction et le partage des savoirs sont un vecteur essentiel de liberté et d’égalité.  Le moyen pour chacun de s’émanciper. De participer à la construction d’un destin individuel et collectif. Le programme de deux heures de cours d’éducation à la philosophie et à la citoyenneté obligatoires dans l’enseignement fondamental franchit progressivement les obstacles. Il illustre parfaitement notre aspiration à vivre libres, ensemble.

Porteurs d’un projet de société, nous le clarifions désormais par notre définition de la laïcité, principe humaniste qui fonde le régime des libertés et des droits de l’Homme sur l’impartialité du pouvoir civil démocratique dégagé de toute ingérence religieuse.

Nous postulons qu’elle oblige l’État de droit à assurer l’égalité, la solidarité et l’émancipation des citoyens par la diffusion des savoirs et l’exercice du libre examen.

Ainsi fallait-il, outre nos publications nous réapproprier le contenu, la direction, la responsabilité de nos émissions concédées et élargir nos communications aux nouveaux réseaux sociaux. Ce fut réalisé avec brio par nos nouvelles équipes.

Ainsi fallait-il nous battre pour replacer le principe de laïcité au centre de nos démocraties et sa reconnaissance en préambule ou au cœur de la loi fondamentale, de la Constitution. Nous avons porté le débat au Sénat et les travaux parlementaires s’en firent largement l’écho.

Ainsi fallait-il, à l’occasion du 50ème anniversaire du Centre d’Action Laïque oser un appel universel à l’adresse des autorités publiques de tous les continents. Les inviter à affirmer leur adhésion à ce principe considéré comme une exigence démocratique essentielle et défendre son inscription dans les Constitutions nationales et les traités internationaux.

Tout cela fut rendu possible et réalisé grâce à votre engagement. Et puisque je ne puis vous citer tous, permettez-moi de vous représenter à l’image de notre Secrétaire Général.

Jean De Brueker, par sa compétence et sa connaissance du mouvement, sa disponibilité et sa fraternité éclairée, a assuré la cohésion des équipes, la synergie des travaux, l’assistance aux associations et la mise en œuvre effective des orientations et décisions du bureau et du conseil d’administration.

Jean nous quittera dans quelques semaines. Il laissera sur place de remarquables directions et l’excellent duo composé de Benoît Vandermeerschen  et Hervé Parmentier.

En d’autres circonstances nous aurions pris davantage plaisir à exprimer et partager notre joie et la satisfaction du travail accompli.

Les temps difficiles du confinement ne l’auront pas permis. Temps difficiles que nous avons néanmoins la chance de vivre en démocratie, en un pays, chose unique au monde, qui subsidie l’assistance morale et la laïcité.

L’appel de Liège était prémonitoire. À la solidarité politique, éthique, humaine et climatique s’ajoute aujourd’hui la prise de conscience d’une nécessaire dépendance sanitaire à l’échelle Universelle. L’Humanité se fait une et de moins en moins divisible. Sans doute assistons-nous aux premiers balbutiements d’une révolution anthropologique plutôt qu’idéologique.

Ainsi, si les Cassandre le disputent actuellement aux messies, il me plait de citer l’historienne Françoise Hildesheimer qui propose plutôt de mesurer l’impact des épidémies aux changements que leur disparition engendrent.

« La disparition de l’épidémie, à partir des années 1772, pour la France, est un phénomène majeur de l’histoire de la peste (…) Quand la maladie est devenue une simple possibilité au lieu d’être une quotidienne réalité, il est devenu possible de raisonner à son endroit et à la raison de triompher de l’irrationnelle maladie avant que la science n’apporte des connaissances valables.

L’importance de la cessation de la peste ne se situe pas seulement en ce domaine : elle affecte également la démographie, l’économie, les relations sociales, à tel point (…) que sa cessation a eu au moins autant d’importance que sa durable présence, en permettant un renversement de conjoncture en tous domaines.

À partir du moment où elle a cessé, le règne du bonheur et du progrès a été à l’ordre du jour des Lumières et le développement démographique a été ininterrompu. ».

Chers amis, chères amies, je suis heureux de passer le flambeau laïque à une femme remarquable, d’accueillir en notre nom à tous notre nouvelle (et première) présidente Véronique De Keyser dont les qualités contribueront à relever ces défis qu’annonce la fin prochaine de la pandémie.

Bonjour et bonne santé à tous,

Henri Bartholomeeusen

Waterloo, le 26 mai 2020