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Sans gluten, sans lactose, sans sucre, sans graisse, sans calories, …

A quoi ressemble notre alimentation aujourd’hui ?

Véritable fléau mondial, « la malbouffe », souvent à l’origine de maladies liées au surpoids ou à l’obésité comme le diabète, l’hypertension artérielle, … est largement influencée par notre environnement et notre mode de vie.

La restauration rapide et les plats préparés, généralement riches en graisse, sucre, sel ou autres produits chimiques (additifs, conservateurs, colorants, …) ont, pour de nombreuses familles, remplacé le « fait maison ».

A côté de cela, un nombre croissant de consommateurs plus soucieux de leur santé ont commencé à prendre conscience du danger que leur faisait courir l’industrie agro-alimentaire et se tournent davantage vers une alimentation naturelle saine et de proximité. Il existe incontestablement un regain d’intérêt pour ce qui est défini comme bon pour la santé, authentique, à savoir ce qui provient du cycle naturel de nos campagnes environnantes. Cette quête du manger « sain et naturel » s’est ainsi érigée en modèle alimentaire induisant de nouveaux comportements et modes de consommation et d’achats, plus respectueux de l’homme, de la biodiversité et des terres.

Se présentant comme les meilleurs, promoteurs de médecines alternatives, diététiciens, spécialistes auto-proclamés, … mettent au point des régimes prônant un retour à une alimentation (pseudo) naturelle. Les stars américaines, les blogueuses – influenceuses – leur font une publicité qui les rend incontournables pour tout quiconque se targue de prendre tant soit peu soin de sa santé.

Que ce soit le végétalisme qui limite l’alimentation à la consommation de végétaux, le véganisme qui interdit non seulement l’ingestion de toute protéine animale (pas de produits laitiers, pas d’œufs, pas de miel,…) mais refuse aussi l’utilisation de tout ce qui provient, d’une manière ou d’une autre, de l’animal (on ne porte pas de laine, de cuir, …), ou au contraire le régime hyper protéiné, que ce soit le régime préhistorique basé sur l’alimentation de nos ancêtres, le « crudivorisme »  dans lequel on ne consomme que des aliments crus, le sans gluten, sans lactose, sans sel, sans sucre, le tout bio, le régime « unicolore » (on ne mange que du vert,…), le jeûne périodique censé éliminer les toxines, …  chacun des adeptes de ces régimes tente de convaincre le consommateur que ce qu’il propose est le meilleur choix possible pour sa santé.

Les modes et les régimes se succèdent à un rythme effréné, les nouveaux faisant passer les plus anciens pour des hérésies.

Après l’engouement pour le magnésium, après celui pour les omégas 3, après le régime sans beurre suivi du retour en grâce de celui qui accompagne si bien nos tartines, après le régime dissocié (on mange de tout mais séparément) pour ne citer qu’eux, voici ceux du sans gluten, du sans lactose, …

Alors bons ou dangereux pour la santé ?

Entre effet de mode et réponse à une pathologie, les régimes restrictifs attirent de nombreux adeptes, pas toujours avertis.

Améliorer sa santé grâce à des régimes miracles, quoi de plus tentant ?  Vouloir préserver la nature, cesser d’infliger de la souffrance aux animaux d’élevage, … ne peut qu’inspirer le respect.

Cependant, tout intéressantes qu’elles paraissent, ces nouvelles pratiques alimentaires ne sont pas toujours sans danger.

Les partisans du sans gluten et du sans lactose sont, en raison de prétendus risques allergiques, de plus en plus nombreux. Or, il faut savoir que l’intolérance au gluten ou maladie cœliaque ne touche que très peu de personnes (entre 0,5 et 1% de la population occidentale) qui, elles, encourent un véritable danger en cas d’absorption et risquent un lymphome au niveau de l’intestin.

Au contraire, loin d’être salutaire, la privation de gluten pour les sujets sains peut s’avérer dangereuse. Des études réalisées notamment par les Universités de Harvard et de Colombia mettent en évidence les dangers qui peuvent résulter de la mode du sans gluten : augmentation du risque d’attaque cardiaque en raison d’une alimentation qui comporterait moins de graines protectrices, augmentation du risque de développer un diabète de type 2.

Quant à ceux qui prétendent mieux digérer ou maigrir, ils se fourvoient, selon le docteur Florence Foucaut : « En fait, ils ont juste arrêté les féculents, le pain, les gâteaux. Forcément, ça fait perdre du poids ».[1]

Quant au lait, il se voit lui aussi accusé de provoquer une série de maladies alors qu’à ce jour aucune analyse scientifique sérieuse n’a pu amener la preuve d’un risque quelconque pour la santé.

Si les régimes végétariens (sans viande et sans poisson) et végétaliens (sans aucun produit d’origine animale) suscitent un véritable engouement notamment à la suite des scandales successifs qui ont entaché l’industrie agroalimentaire allant de la vache folle à la peste porcine en passant par la grippe aviaire, les lasagnes à la viande chevaline,  par les conditions horribles d’élevage dans les fermes-usines et par les scènes de cruauté filmées dans certains abattoirs,… à quoi il faut ajouter la présence dans la viande et le poisson de substances chimiques comme des métaux lourds (mercure dans le poisson,…), d’OGM, d’hormones de croissance, d’antibiotiques, ils ne sont pas toujours sans danger pour la santé.

Une consommation excessive de viande rouge peut certes être à l’origine de maladies cardiovasculaires et de cancers notamment du colon et des intestins mais l’absence de protéines animales provoque quant à elle des carences en vitamines B12 et D, en oméga 3, en fer dont le défaut peut provoquer de l’anémie,  …

Les protéines animales nous apportent une variété inégalable d’acides aminés dont certains sont indispensables parce que nous ne savons pas les fabriquer.[2]

Un régime végétalien va nécessiter de consommer énormément de végétaux et qui dit végétaux dit fibres, et celles-ci ont pour effet collatéral de piéger certains minéraux et vitamines, empêchant leur assimilation par l’organisme. Sans compter l’inconfort intestinal qu’une alimentation très riche en fibres peut induire. En outre, il y a un risque accru d’anémie, la viande étant une source incomparable de fer facilement assimilable.

De plus, pour éviter une carence en vitamine B12, un végétalien devra compenser par des compléments alimentaires qui proviendront du système digestif des ruminants, puisqu’on ne sait pas la synthétiser artificiellement.

L’adulte peut s’en sortir avec peu de protéines animales car son organisme est incroyablement adaptable mais il n’en va pas de même pour l’enfant ou le vieillard qui encourent un grand risque de malnutrition et de multiples carences.

Pour de nombreux consommateurs, un aliment naturel – non transformé – est forcément synonyme de sain et d’écologique or, les polémiques récentes autour de l’huile de palme et du soja montrent que ceux-ci ne sont pas aussi bons qu’on le pense.

Aujourd’hui, le soja en raison de sa richesse en protéines et sa faible teneur en graisse, attire des consommateurs en quête d’une alternative aux produits substitutifs à la viande et aux protéines animales comme le steak végétal, le tofu, le lait végétal, … Toutefois, sachant que le soja contient des perturbateurs endocriniens (phyto-œstrogènes) capables d’influer sur le système hormonal, il est recommandé aux adultes de limiter leur consommation à 60 mg par jour, soit l’équivalent d’environ deux verres de lait de soja. Il est vivement déconseillé aux enfants de moins de trois ans.[3]

De plus, il faut savoir que cette plante, utilisée par les éleveurs européens et dans les produits industriels comme additif alimentaire, provient en grande partie du Brésil et d’Argentine et est généralement issue d’une production transgénique qui est la norme dans ces pays. Lorsqu’on sait que Bayer a racheté les semences génétiquement modifiées de Monsanto qui risquent donc de voir leur usage intensifié en Europe, il y a de quoi trembler !

Quant à l’impact environnemental négatif – déforestation – de la production de l’huile de palme, il n’est plus à démontrer. Or celle-ci se trouve en tant qu’additif alimentaire dans bon nombre de denrées appartenant non seulement à la filière conventionnelle mais aussi à la filière bio.

Et les compléments alimentaires, utiles ou dangereux ?

Mincir sans effort, faire disparaître ses rides, avoir un joli teint bronzé, mieux dormir, …  les compléments alimentaires promettent beaucoup et connaissent un réel succès auprès de consommateurs qui en attendent des bienfaits pour leur santé. En quelques années, les gélules dédiées au bien-être ont envahi les rayons des pharmacies et parapharmacies. Secteur en pleine croissance, il représente en France plus d’un milliard et demi d’euros annuels et ce sont chaque année près de 500 nouveaux produits qui apparaissent sur le marché.

Vendus sans ordonnance, leur mise sur le marché ne nécessite aucune autorisation préalable. Certains d’entre eux peuvent même s’avérer dangereux car élaborés à partir de plantes qui ne sont pas toujours inoffensives. C’est le cas par exemple du millepertuis utilisé dans le traitement de la dépression et dont l’interaction avec d’autres médicaments peut être risquée.

Les allégations « santé » présentes sur les boîtes doivent cependant être validées par l’Agence européenne de sécurité alimentaire. Mais pour vanter toujours plus les mérites de leurs produits, certains fabricants ont trouvé une parade : le « dispositif médical » qui les dispense de toute formalité d’agréation.[4]

Si certains peuvent être nocifs pour la santé, d’autres n’ont d’effet que celui d’un placebo.

Quant aux produits censés faire perdre du poids, leur efficacité est très variable. deux études présentées au Congrès international sur l’obésité qui s’est tenu à Stockholm du 11 au 15 juillet 2010, montrent l’inefficacité de ces produits.

Particulièrement ciblés pour leur éventuelle dangerosité, les produits vendus sur internet.

Le « magazine de la santé » a procédé à l’analyse de quelques-uns de ces produits étiquetés « 100% naturels ». Les premiers sont des poudres amaigrissantes. L’analyse révélera que, loin d‘être naturelles, les gélules contenaient des médicaments, le premier étant un coupe-faim interdit à la vente depuis 2010 pour avoir provoqué des morts et le second, un laxatif lui aussi retiré du marché.

L’analyse a également porté sur des compléments destinés à favoriser l’érection et a révélé la présence de Viagra et de Cialis lui aussi utilisé dans le traitement des troubles érectiles et dont l’interaction avec des médicaments pour le cœur peut s’avérer très dangereuse.[5]

Le service de la répression des fraudes révèle que 80% des produits vendus sur internet sont frauduleux.

Une alimentation équilibrée et de qualité est à même de nous apporter tous les nutriments nécessaires à la préservation de notre santé sans qu’il soit besoin d’avaler moultes pilules.

Un business lucratif

Dans tous les cas, qu’ils soient justifiés ou non par des intolérances alimentaires ou des considérations morales, tous ces régimes nourrissent indéniablement un business très lucratif. A l’instar du « sans gluten » et du « sans lactose », ils fonctionnent pour la plupart par l’exclusion – « sans protéines », « détox » ou « sans toxines », … et ces mots font vendre. En effet, le consommateur, persuadé du bénéfice santé, se retrouve prêt à payer plus cher des produits qui ne sont pas forcément meilleurs pour la santé que du contraire !

Le consommateur doit prendre conscience que nombre des régimes miracles qui lui sont « vendus » sont élaborés sans aucun fondement scientifique et peuvent l’exposer à des carences parfois très graves.

Conclusion

C’est quand on mange de tout, avec modération, que l’on se situe le plus loin possible du risque de carences. L’être humain est omnivore ! certes les végétaux tiennent une place importante dans notre alimentation mais le poisson ou les œufs sont aussi d’excellentes sources de protéines animales, en alternative à la viande rouge qui apporte en plus la vitamine B12 et le fer dont nous avons besoin.

Quant aux compléments alimentaires, beaucoup sont totalement inutiles voire dangereux.

L’essentiel est de manger équilibré en respectant le plus possible les circuits courts et bio et surtout de ne se priver d’aucun groupe d’aliments.

Patricia Keimeul
Directrice FAML

 

[1]https://www.lexpress.fr/actualite/societe/sante/les-dangers-des-regimes-sans_2045329.html

[2]  http://sante.lefigaro.fr/actualite/2015/10/26/24247-alimentation-sans-proteines-animales-difficile-deviter-carences

[3] https://www.adeic.fr/2016/12/20/lemergence-de-nouveaux-modes-alimentaires-de-consommation-dachats/

[4] https://www.allodocteurs.fr/alimentation/complements-alimentaires/complements-alimentaires-utiles-ou-dangereux_1593.html#paragraphe1

[5]https://www.allodocteurs.fr/alimentation/complements-alimentaires/complements-alimentaires-utiles-ou-dangereux_1593.html#paragraphe1

Sécurité alimentaire et croissance démographique: un défi humain à notre portée

Les quelques décennies qui sont devant nous seront décisives pour l’avenir de l’humanité et nous sommes dès aujourd’hui confrontés à des choix fondamentaux. Il s’agira en effet d’accroître le volume de nos productions agricoles de manière à nourrir une population mondiale qui va continuer à croître rapidement. Et dans le même temps, faire face à des contraintes environnementales qui vont impacter nos modes de consommation alimentaire et nos politiques de santé publique.

Passer de 7,5 à au moins 11 milliards d’habitants en 2100

Selon les diverses projections démographiques, nous devrions être entre 11 et 12 milliards d’habitants en 2100. La bonne nouvelle est sans doute que les taux de fécondité à travers le monde ont considérablement chuté depuis une trentaine d’années. C’est dans ce contexte que certains proposent une autolimitation volontaire des naissances de manière à réduire l’impact humain sur l’environnement. Tandis que d’autres au contraire nous prédisent l’imminence d’un recul démographique en s’inspirant des conséquences de la politique de l’enfant unique en Chine.

La forte inertie des courbes démographiques nous laisse percevoir que ces deux positions extrêmes sont peu significatives : les comportements des populations en matière de fécondité évoluent au cours du temps, mais aucun changement brutal de tendance ne peut être observé sur le court terme. Le débat portant sur ce qu’il convient d’entreprendre de manière à stabiliser la population mondiale de manière soutenable nous ramène à un vieux débat : celui entre Malthus et Marx.

Au cours des années ’70, les thèses malthusiennes portant sur un écart insurmontable entre croissance géométrique de la population et croissance arithmétique des surfaces agricoles ont été redébattues. Entre autres grâce au Rapport sur les limites de la croissance du Club de Rome. Cecidans un cadre marqué par la crise pétrolière, les dimanches sans voiture et les premières alarmes environnementales touchant à une extension prévisible de la croissance et du bien-être à l’ensemble de la population mondiale.

Les régimes communistes de l’époque – ainsi que l’essentiel de la gauche démocratique en Europe – plaidaient en faveur d’une approche productiviste. Ainsi qu’en insistant sur la réduction des inégalités sociales et sur la lutte contre la pauvreté en tant que cause majeure du galop démographique.

Le planning familial : laissez-faire, ou coercition ?

Ce débat touche bien évidemment au dilemme suivant : faudra-t-il se contenter du laissez-faire en matière de natalité, ou bien au contraire se reposer sur des méthodes coercitives de limitation des naissances ? Plutôt que de trancher entre ces deux choix extrêmes, il importe sans doute de retenir quelques-uns des paramètres qui semblent avoir déjà fait leurs preuves. Tout d’abord, le niveau d’instruction des filles dans chacun des pays concernés semble jouer dans la plupart des cas un rôle déterminant. Ensuite, l’accès aux soins de santé primaire et la mise à disposition de méthodes contraceptives efficaces grâce à un réseau de dispensaires accessibles sur l’ensemble des territoires. Enfin, une meilleure circulation des échanges portant sur des technologies aux diverses situations de terrain : à titre d’exemple, on peut aujourd’hui envisager la livraison de pilules contraceptives dans les villages les plus reculés grâce à des drones. Mais pouvoir tirer le meilleur profit de ces trois déterminants suppose des structures étatiques bien organisées et également une synergie efficace avec le secteur privé. Ceci en devant toujours garder présent à l’esprit que les populations les plus pauvres devront se voir garanti un accès effectif à ces divers services.

Changement climatique et production alimentaire

Si la production alimentaire devra suivre la croissance de la population, un troisième facteur ne peut que s’imposer à l’attention : la préservation de notre environnement face à un double défi. Tout d’abord, le changement climatique et ses impacts sur la production agricole. Et ensuite l’impact des diverses pollutions sur les sols et les océans.

S’agissant du changement climatique, la croissance des températures aura pour effet le déplacement de certaines cultures. Mais également un impact sur le régime des précipitations, à savoir soit des sécheresses, soit une pluviosité accrue. Il est donc décisif que les paysans puissent s’y adapter. A cet égard, il semble essentiel de prévoir la mise en place de banques de semences de cultivars traditionnels à mettre à disposition des agriculteurs : en effet, pouvoir en fonction du climat attendu disposer d’une gamme plus étendue de types de récoltes possibles est une méthode qui a fait ses preuves dans le passé. Mais tout aussi importante restera la pérennité d’une agriculture vivrière de subsistance face à des culturesde rente. En effet, seule une agriculture vivrière est à même de garantir une gestion pondérée des sols et des intrants fertilisants. Il importe par ailleurs de mettre fin à l’importation de produits agricoles à prix subsidiés qui tuent l’agriculture paysanne locale et poussent à l’exode vers les villes. Des terres désertées deviendront en effet impropres à tout usage agricole.

Quant aux océans, leurs ressources halieutiques sont aujourd’hui à la peine à cause de la surpêche, mais également suite à la mise en décharge en milieu marin de nombreux polluants. Métaux lourds et micro-particules de plastic, entre autres. Tout comme s’agissant de l’agriculture vivrière, la pêche artisanale nécessite une maind’oeuvre considérable et les produits de la mer constituent la principale source de protéines pour des centaines de millions d’habitants. Il serait donc plus que souhaitable que la pêche vivrière soit mieux protégée de la pêche industrielle – leplus souvent étrangère – qui prélève le plus gros des ressources halieutiques le long des côtes des pays concernés. Toute extension des limites des eaux territoriales nationales serait ici bien utile.

 

Croissance démographique et idéologie

Nous avons vu que les tenants d’une gauche productiviste sont pour l’essentiel anti-malthusiens : à leurs yeux, seule une réduction de la pauvreté permettra – à terme – de freiner la croissance démographique. Le socialisme et l’égalité seront sensés y pourvoir. La question reste bien entendu de savoir si – et dans combien de temps – une telle réduction marquée des inégalités deviendra possible. Et si nous pouvons nous permettre de l’attendre.

Par ailleurs, le « croissez et multipliez » est également de mise s’agissant de l’Eglise catholique dans cette même logique – assez abstraite – de
réduction des inégalités. Mais la défense inconditionnelle de toute forme de vie humaine dès la conception est bien évidemment au coeur du débat s’agissant des diverses confessions chrétiennes,voire des religions de manière générale.

La question à se poser est ici la suivante : sachant que toute méthode de contraception moderne et efficace est considérée par l’Eglise catholique comme un micro-avortement, sera-t-il possible de convaincre une partie significative de ses fidèles que contraception et avortement ne sont pas nécessairement à mettre sur le même pied ? Connaissant le poids des religions dans la plupart des pays à forte croissance démographique, ne serait-il pas judicieux de chercher à découpler soigneusement contraception et avortement ? Et sans devoir pour autant renoncer au droit à l’avortement pour chacune, tenter de se centrer sur des campagnes portant sur la contraception avant toute chose ? A des fins d’efficacité, la question mérite sans doute d’être débattue.

Prise de responsabilité et pragmatisme

Concluons en revendiquant des solutions pragmatiques à opposer à des déclarations de principe. Ceci sans ignorer les pistes rendues possibles par les innovations technologiques qui se déroulent chaque jour sous nos yeux. Mais ces technologies nouvelles ne pourront pas tout régler à elles seules. Il nous revient donc dès à présent de prendre nos responsabilités en matière de choix politiques et sociétaux face à ce triple défi : une production alimentaire suffisante pour tous, une croissance démographique à maîtriser et une gestion raisonnée et durable de notre environnement.

Car les trois sont intrinsèquement liés.

François Braem
Anthropologue

Maigrir à tout prix ? Les pièges de l’industrie de l’amincissement

A chaque époque de l’histoire, la recherche de l’idéal de beauté a amené les hommes et les femmes à entreprendre des régimes ou à avoir des pratiques parfois farfelues. Durant l’antiquité, le médecin grec Hippocrate conseille de : « manger une seule fois par jour, de faire de l’exercice physique avant de manger, de dormir le moins possible, de dormir sur un lit dur, de rester nu le plus longtemps possible, etc. ».1

Si aujourd’hui, la minceur a tendance à être considérée comme la norme, cela n’a pas toujours été le cas. Pendant la préhistoire, l’Antiquité et le Moyen Age, avoir de l’embonpoint était considéré comme quelque chose de positif. Il s’agissait d’un signe d’opulence à une période où la famine pouvait souvent régner.

Progressivement, l’idéal de minceur s’est installé aussi bien pour des raisons religieuses que de santé. La minceur est devenue une sérieuse préoccupation au sein de la bourgeoisie au XIXe siècle pour devenir un véritable phénomène de mode au XXe siècle.2

Actuellement, on assiste à un réel paradoxe : « La critique sociale et le rejet vis-à-vis de toutes les formes de grosseur est extrême, et ce, malgré l’augmentation du nombre de cas d’obésité ». L’envie de correspondre aux modèles de beauté incite souvent à se tourner vers des solutions rapides tant vers des type produits3, que des services4 et ou moyens5 amaigrissants. Leurs promesses sont
bien alléchantes pour ceux et celles qui souhaitent perdre leurs kilos indésirables rapidement.6 Une étude réalisée en 2010, montre qu’il ne s’agit pas d’une préoccupation isolée puisque « pas moins de 92% des Belges interrogés reconnaissent vouloir perdre du poids et 74% d’entre eux déclarent avoir déjà entamé un ou plusieurs régimes ».7

La préoccupation excessive à l’égard du poids s’impose comme un phénomène social qui banalise le recours à des méthodes parfois dangereuses. « La stigmatisation des personnes en surpoids est un phénomène répandu, tant au sein des familles, amis, collègues que chez les professionnels de la santé ». Faiblesse dont profite l’industrie de l’amincissement8.

Différentes études ont démontré l’inefficacité des régimes à long terme puisque « dans 95% des cas, les personnes regrossissent dans les trois ans et dépassent souvent leur poids initial ».9 Autant d’échecs qui poussent certaines personnes à se tourner vers des « remèdes miracles » qu’ils soient autorisés ou non en Belgique.

Quand la presse et la science se font berner.

« Le chocolat aide à rester mince » : cette allégation minceur, on a pu la lire dans la presse en 2015 et elle continue de tourner sur les réseaux
sociaux. Beaucoup de gens aimeraient que cette légende soit vraie. Mais d’où vient-elle ?

Deux journalistes de la télévision allemande ont lancé l’étude suivante : « seize sujets volontaires, cinq hommes et onze femmes de 19 à 67 ans, ont suivi les recommandations des expérimentateurs pendant trois semaines, mais ils ignoraient qu’ils allaient participer à une étude truquée ». 10 Ils ont ensuite fait paraître l’étude Chocolate with high cocoa content as a weight loss accelerator dans une revue scientifique.11

Leur objectif ? Montrer qu’une étude faite avec des moyens scientifiques limités et basée sur un concept peu vraisemblable, « le chocolat fait maigrir », pouvait être publiée dans une revue scientifique, puis reprise par d’autres médias. L’étude a facilement pu être publiée dans une revue spécialisée : « l’International Archives of Medicine, moyennant simplement la somme de 600 euros et sans aucune relecture par les pairs ». Ensuite, tout le monde s’en est emparé.

Les journalistes ont donc atteint leur but, ils ont ainsi prouvé qu’on pouvait faire facilement parler des études « scientifiques » et leurs résultats.

Quelques méthodes utilisées par l’industrie de l’amaigrissement

Les entreprises qui vendent des produits minceurs sont extrêmement nombreuses. La première est l’(ancienne) grande star de l’amincissement pendant des années, elle semble actuellement plus discrète. En Belgique, même son changement de nom est presque passé inaperçu même si l’entreprise brasse chaque année plusieurs millions de dollars ?. La deuxième entreprise, vous la voyez partout et tout le
temps à la télévision, jusqu’à trois publicités sur un seul interlude de cinq minutes. La dernière a été choisie parce qu’elle est un peu différente, peut-être avec un accent plus jeune, détourné du simple régime, on ne vous promet pas un simple amincissement mais une remise en question de toute votre alimentation et de votre mode de vie.

Des pratiques commerciales qui frôlent avec la légalité, le harcèlement, la vente presque forcée, le régime alimentaire peu équilibré, allant jusqu’à provoquer des carences, certaines compagnies ne reculant devant rien pour vendre leurs produits.

L’ « ancienne » grande star du régime

L’entreprise est fondée en 1963 aux Etats-Unis. Des millions de personnes à travers le monde auraient suivi un de leur programme. Leurs principes ? Un régime à points et des réunions collectives. Au départ, il s’agissait principalement de prendre conscience de ce que l’on consommait et de se rendre chaque semaine à des réunions, pour évaluer la perte de poids. Etre félicité et encouragé si tout se passait bien ou « réprimandé » par l’animatrice si la perte n’était pas suffisante. En 2013, cette société était présente dans une quarantaine de pays, et présentée comme le leader mondial des services liés à la perte de poids, « organisant chaque semaine 50 000 réunions accueillant 1,4 million de membres ».12

Une société désormais en perte de vitesse mais dont le chiffre d’affaires a atteint 1,45 milliards de dollars en 2017. Un phénomène qui s’explique probablement par la grande concurrence sur le marché de la minceur. Mais peut-être aussi à cause des résultats : une étude publiée en 2007 dans le British Journal of Nutrition, met en avant que le taux d’échec à 5 ans du programme atteindrait 84% ».13 Un changement de nom pour changer l’image qui colle à la peau de cette société.

Le régime que vous voyez à chaque spot publicitaire

A chaque interlude publicitaire, vous aurez droit soit à leur directeur qui vous garantit que ce régime vous conviendra, soit à une de leur coach minceur que vous pourrez avoir au téléphone, ou encore à une cliente satisfaite, tout le monde est là pour vous pousser à vous lancer dans leur aventure. « Vous ne risquez rien puisque la première semaine est offerte ».

Le principe est simple : des plats régimes, livrés directement à votre domicile. Ils vous envoient la nourriture pour un mois en une fois : quatre grosses boîtes arrivent donc chez vous. Si vous voulez bénéficier de la semaine gratuite et arrêter le programme, il vous faudra donc renvoyer les trois semaines restantes, engendrant ainsi des coûts et demande au client du temps. Autant de raisons qui poussent les insatisfaits à conserver leur colis malgré la déception.

Environ 500 euros pour un mois, ce n’est pas donné mais au téléphone on vous garantit que c’est très peu finalement, que cela vous coûterait
de vous nourrir et que c’est pour votre bien. Si on ne tient pas compte de la qualité des produits proposés. En termes de santé, les repas ne couvrent pas les besoins journaliers.14

Les commentaires sur internet sont soit très élogieux, tout est rose, le régime permet une perte rapide de poids, soit ils mettent en avant de graves manquements en particulier au niveau du service après-vente. Chaque commentaire est lu et commenté par la marque, qui tente de maintenir au maximum sa réputation.15

Besoin d’un nutri-coach ?

De belles photographies, des promesses d’une vie plus saine et d’un amaigrissement durable, vous avez peut-être eu un contact sur les réseaux sociaux qui vous veut du bien ; mais qu’est-ce qui se cache derrière cette entreprise ?

L’entreprise fondée dans les années 1970 aux USA développait au départ des détecteurs d’incendie et de fumée. Dans les années 1980, elle élargit son offre aux filtres à eau et à air. En 1993, elle se tourne vers la vente de compléments alimentaires en se définissant comme : « une entreprise mondiale fructueuse qui aide toujours les gens à avoir une vie meilleure dans, aujourd’hui, plus de 20 pays ».16

Le nutri-coach qui essaie de vous vendre ses produits n’est pas diététicien. Le métier de nutritionniste n’est en effet pas protégé comme l’est celui de diététicien. N’importe qui peut donc s’improviser nutri-coach et proposer des conseils. Le coach a deux missions : la première est de publier un maximum de choses pour vous faire rêver et vous donner envie de vous lancer dans l’aventure pour avoir une vie plus saine, pour maigrir. Chacun de vos achats lui rapporte de l’argent. Le deuxième objectif est de convaincre certaines personnes de se lancer également dans l’aventure « nutricoach » puisque l’entreprise fonctionne par le marketing de réseau.

Le principe est de vendre via un réseau de revendeurs, qui vont à leur tour vendre à leurs contacts proches ou lointains, avec la possibilité de parrainer également d’autres vendeurs en échange d’une commission cumulative sur les ventes.17 C’est avec ce même système que fonctionne Tupperware. Le recrutement d’autres vendeurs est une clé du système, des petits vendeurs amateurs qui vont créer un peu de chiffre d’affaire mais qui n’auront eu que très peu de bénéfices de leurs ventes.

Les nutri-coaches sont donc des gens qui vous  peut-être du bien mais qui cherchent surtout leur propre bénéfice.

Les médicaments pour maigrir

A la recherche « médicaments pour maigrir vite », Google propose plus d’un million d’occurrences. Autant de produits qui sont vendus en toute légalité dans les supermarchés, dans les pharmacies ou encore sur internet. Ces médicaments sont très nombreux en vente libre, ils ont pour but de couper l’appétit ou d’empêcher l’absorption des graisses.

L’envie de maigrir plus vite incite également certaines personnes à acheter des remèdes miracles sur internet qui sont en réalité des médicaments illégaux. L’AFSCA recense différents produits dangereux qui ont été commercialisés : 26 cas d’intoxication avec du Clenbutérol ont été constatés. Il s’agit d’un médicament (Ventipulmin) uniquement destiné au traitement de chevaux présentant des problèmes respiratoires et qui est régulièrement utilisé pour ses propriétés amincissantes ». On retrouve en vente des capsules qui contiennent des pesticides : le DNP. Ce produit aura coûté la vie à plusieurs personnes à travers le monde.18

Les contrôles et la loi dans tout cela ?

Aux États-Unis, on estime à 23.005 le nombre de visites annuelles, aux urgences des hôpitaux, attribuées aux effets indésirables liés à la consommation de compléments alimentaires. Il arrive à l’AFSCA de détecter des produits illégaux et dangereux dans certains produits commercialisés sur internet, ils sont alors retirés de la vente. 19

De nombreux produits pharmaceutiques présentent des allégations : «sans sucres ajoutés», «réduit le cholestérol» ou plus spécifiquement
sur les produits minceurs : contribue à la perte de poids dans le cadre d’un régime», «aide à affiner ou préserver votre silhouette», «freine l’absorption des graisses et stimule l’élimination des lipides et des glucides»….autant d’appellations qui poussent souvent les consommateurs à acheter ces produits. Selon Test- Achat : « une allégation doit identifier le nutriment actif ainsi que son effet exact et, bien sûr, être prouvée. Evidemment, c’est loin d’être toujours le cas ». 20 L’Union européenne a donc décidé de créer une loi en 2007 pour lutter contre les allégations mensongères et depuis 2012, les étiquettes et les messages publicitaires qu’ils soient présentés sur internet, à la télévision ou sur tout autre moyen de diffusion doit répondre à des critères bien précis sous peine d’être dans l’illégalité. 21 Cependant, les spécialistes du marketing sont assez forts pour détourner les réglementations européennes qui sont encore trop vagues et laissent plus à l’interprétation. 22

Quand le scalpel devient une solution : Les opérations bariatriques

Aujourd’hui, l’opération seule peut parfois être la dernière solution, ou la solution de facilité pour certaines personnes. Des opérations qui ont chaque année plus de succès. Les médecins prescrivent moins de régime, certaines émissions de télévision qui présentent ces opérations comme la solution rêvée. En 2017, 14.000 opérations ont été pratiquées en Belgique, selon des chiffres de l’INAMI.23

Il existe principalement deux types d’opérations bariatriques : le sleeve qui permet de réduire la taille de l’estomac et le by pass qui diminue l’ingestion et absorption des aliments.

Pour subir une telle opération, il faut normalement répondre à des critères très sévères comme être atteint d’obésité morbide, avoir déjà
tenté de maigrir par des moyens plus traditionnels. D’autres facteurs de risque peuvent faciliter l’accès à l’opération : comme le diabète ou des apnées du sommeil.

Certains médecins peu scrupuleux réalisent des opérations sur des patients qui n’y ont pourtant pas droit en rajoutant quelques kilogrammes au patient ou en prétendant réaliser une autre opération.24 Là encore, maigrir peut vite devenir un business.

Si l’opération permet de fortement maigrir, elle présente également des risques (carences, troubles neurologiques, des complications générales (respiratoires, cardiaques, hépatiques, ..), le taux de ré-intervention est assez élevé. Beaucoup de risques et de désagrément quand on sait que 20 % des patients ne connaîtront pas une stabilité pondérale dans les dix ans.25

Pour clôturer

Alors que dans le monde, un milliard de personnes souffrent actuellement de faim et de sous-alimentation, nos sociétés occidentales sont de plus en plus sédentaires, mangent souvent mal et l’obésité est de plus en plus fréquente. Pourtant, la minceur reste l’idéal à atteindre, tous les
moyens de maigrir sont donc bon à prendre. L’industrie l’a bien compris et surfe sur la vague pour vendre à prix d’or, ce rêve de silhouette idéale.

Que le prix en soit l’argent ou la santé.

Marie Béclard
FAML

1 S. PEQUET, Maigrir à tout prix. Une obsession intemporelle, édition 2010, p. 7, article consulté sur le site https://
questionsante.org/assets/files/EP/maigrir-1.pdf
2 S. PEQUET, Maigrir à tout prix. Une obsession intemporelle, édition 2010, p. 15, article consulté sur le site https://
questionsante.org/assets/files/EP/maigrir-1.pdf
3 On entend par produit tout ce qui se réfère aux produits de santé naturel et aux substituts de repas.
4 On entend par les services : les programmes commerciaux, les programmes offerts dans les centres d’entraînements et les groupes d’entraide
5 On englobe, dans cette catégorie ,les timbres minceurs (patches) ,crèmes minceurs ,vêtements minceurs, bref tout appareil ou produit pour la perte de poids.
6 ht t p : / / w w w . a s p q . o r g / u p l o a d s /pdf/565cac833208fappel-a-l-action_2015-11-30.pdf
7 S. PEQUET, Maigrir à tout prix. Une obsession intemporelle, édition 2010, p. 7, article consulté sur le site https://questionsante.org/assets/files/EP/maigrir-1.pdf
8 ht t p : / / w w w . a s p q . o r g / u p l o a d s /pdf/565cac833208fappel-a-l-action_2015-11-30.pdf P.8
9 L. Azernour-Bonnefoy, Maigrir : sachez écouter votre corps !, interview du docteur Jean-Philippe Zermati, juin 2010 – www.sante-az.aufeminin.com repris dans S. PEQUET, Maigrir à tout prix. Une obsession intemporelle, édition 2010, p. 7, article consulté sur le site https://questionsante.org/assets/files/EP/maigrir-1.pdf
10 Informations consultées le 8 février 2019 sur le site https://www.acrimed.org/Le-chocolat-fait-maigrir-quandmedias-et-publications-scientifiques-se-font
11 Informations consultées le 8 février 2019 sur le site https://www.acrimed.org/Le-chocolat-fait-maigrir-quandmedias-et-publications-scientifiques-se-font
12 Informations consultées le 8 février 2019 sur le site https://fr.wikipedia.org/wiki/Weight_Watchers
13 ht tps: //www.ncbi .nlm.nih.gov/pmc/ar ticles/PMC3145588
14 Informations consultées le 02 février 2019 sur le site https://www.rtbf.be/info/societe/onpdp/detail_on-ateste-le-regime-comme-j-aime-pendant-1-mois-attentiondanger?id=10057284
15 Informations consultées sur le 10 février 2019 sur le site https://fr-be.trustpilot.com/review/commejaime.fr
16 Informations consultées le 10 février 2019 sur le site https://www.juiceplus.com/be/fr/franchise/about-the-juiceplus-company/juiceplus-company
17 Informations consultées sur le 01 mars 2019 sur le site https://www.conseilsmarketing.com/e-marketing/lemarketing-de-reseau-comment-ca-marche
18 Informations consultées le 10 février 2019 sur le site http://www.afsca.be/publicationsthematiques/_documents/2014-06-18_Rapport_annuel_CMDH_2013.pdf
19 Informations consultées le 8 février 2019 sur le site http://www.afsca.be/comitescientifique/avis/2013/_documents/AVIS28-2013_FR_DossierSciCom2012-23.pdf
20 Informations consultées le 2 février 2019 sur le site https://www.test-achats.be/sante/alimentation-et-nutrition/regimes-allergies/dossier/allegations-minceur
21 https://www.efsa.europa.eu/fr/topics/topic/general-function-health-claims-under-article-13
22 Informations consultées le 2 février 2019 sur le site https://www.test-achats.be/sante/alimentation-et-nutrition/regimes-allergies/dossier/allegations-minceur
23 Informations consultées le 2 février 2019 sur le site https://www.rtbf.be/info/societe/detail_obesite-les-derives-
du-recours-a-la-chirurgie?id=10131757
24 Informations consultées le 2 février 2019 sur le https://www.rtbf.be/info/societe/detail_obesite-les-derives-du-recours-a-la-chirurgie?id=10131757
25 Informations consultées le 2 février 2019 sur le site http://www.uclmontgodinne.be/files/2016qo_chirurgie_bariatrique.
pdf

 

 

Pour une alimentation (plus) sûre

En 1999 survient la crise de la dioxine à savoir la contamination par ce produit d’aliments pour animaux d’élevage.

Une enquête avait alors démontré que la contamination trouvait son origine au sein de l’entreprise Verkest, située à Deinze et de la société wallonne Fogra, basée à Bertrix. Cette dernière fournissait des graisses contaminées au PCB (polychlorobiphényles) à Verkest, qui les livrait ensuite à des fabricants d’alimentation pour bétail. Les Verkest déclaraient fournir à leurs clients de la graisse animale fondue. Il s’agissait en réalité d’un mélange de graisses animale et technique. En 2018, les deux protagonistes seront condamnés à verser 24 millions d’euros à l’AFSCA.

Pour tenter d’éviter la répétition de telles dérives, l’Etat a créé, en 2000, l’agence fédérale pour la sécurité de la chaîne alimentaire (AFSCA) dans le but de renforcer les contrôles en regroupant les différents départements ministériels concernés. L’agence a, comme son nom l’indique, pour mission de veiller à la sécurité de la chaîne alimentaire afin de protéger la santé des hommes, des animaux et des plantes. Elle dispose pour ce faire de près de mille trois cents collaborateurs dont six cent septante affectés aux unités locales de contrôle. Elle peut également compter sur cinq laboratoires internes complétés par un réseau de soixante laboratoires externes agréés et sur un service luttant contre les fraudes pour accomplir les différentes missions qui lui sont conférées. Un budget de 164 millions lui est alloué. Elle est non seulement compétente pour le contrôle des denrées alimentaires, des aliments pour animaux, des matières fertilisantes et des produits phytopharmaceutiques mais elle se charge également des mesures de prévention et de lutte sanitaires (maladies animales) et phytosanitaires
(secteur végétal). Elle veille également à la communication sur toutes les matières qui la concernent, en particulier l’information fournie
aux consommateurs. D’autres missions lui sont également déléguées comme les contrôles de l’interdiction de fumer, les contrôles de qualité à l’importation et à l’exportation et ceux du bien-être des animaux de rente. 4Malgré les mesures prises pour sécuriser la
chaîne alimentaire, depuis de nombreuses années, les scandales entachant l’industrie alimentaire se succèdent, justifiant si besoin est,
l’existence de l’agence.

La maladie de la vache folle (encéphalopathie spongiforme bovine) causée par la présence de farines animales dans l’alimentation des bovins
provoquera le décès de plusieurs centaines de personnes en Europe.

La grippe aviaire H5N1 trouve son origine au Vietnam et en Thaïlande. Des millions de poulets, canards et oies sont infectés et transmettent la maladie à l’homme. Alors qu’on s’attendait à une pandémie de très grande ampleur, le nombre de victimes se limitera finalement à quatre cents.

Les autorités sanitaires irlandaises détectent la présence de viande de cheval dans des steaks hachés estampillés pur boeuf. À la suite de cela, la société Findus effectue des tests qui révèlent que 29% de la viande contenue dans les lasagnes et les moussakas est d’origine chevaline. L’affaire touche l’Europe tout entière et pose la question de la traçabilité des aliments.

En 2011, la bactérie Escherichia Coli provoque diarrhées sanglantes et infections intestinales et cause la mort de 47 personnes tandis que 4.000 sont malades. Pointés comme responsables, des concombres, des tomates et des salades seront rapidement mis hors de cause. Des graines germées provenant d’une ferme biologique seront finalement identifiées comme étant les coupables. La présence de fipromil a conduit à la destruction de 77 millions d’oeufs et à l’euthanasie de 2 millions de poules et mis en danger la santé de nombreux consommateurs.

Aujourd’hui, c’est à la peste porcine africaine que nous sommes confrontés. Les premiers cas de cette maladie ont été détectés le 13 septembre 2018 chez des sangliers trouvés morts dans la région d’Etalle, en province de Luxembourg. Tant les sangliers que les porcs d’élevage se trouvant dans la zone contaminée seront mis à mort et les exploitations ne pourront être repeuplées jusqu’à éradication de la maladie. L’AFSCA, en collaboration avec la région wallonne, a également établi une zone tampon adjacente à la zone infectée et dans laquelle les mesures sanitaires sont également en vigueur.1

Outre le traitement des grands scandales alimentaires, l’AFSCA travaille au quotidien dans le contrôle des commerces alimentaires et des établissements HORECA. Ainsi des prélèvements effectués dans des « snacks pitas » ont révélé que dans la moitié des restaurants, des échantillons présentaient une mauvaise qualité microbiologique à la suite d’un manque d’hygiène et d’une mauvaise gestion thermique des aliments.2

Excès de zèle ou principe de prudence ?

Si ces contrôles sont généralement de nature à rassurer les consommateurs que nous sommes, d’aucuns jugent le zèle de l’Agence un peu trop tatillon à l’égard de certains.

Le ministre wallon en charge du Développement durable, Carlo Di Antonio qualifiait, dans un communiqué, l’action de l’organe de contrôle
« d’entrave à la transformation à la ferme, au développement des PME agroalimentaires locales et du circuit court ».3 Et d’ajouter que « depuis sa mise en place en 2002, de nombreux agriculteurs et producteurs ont témoigné des difficultés qu’ils rencontrent avec l’Agence fédérale pour la Sécurité de la Chaîne alimentaire. Nombreux sont ceux qui ont dû fermer leurs portes. »

Alors même que la production, la transformation et la vente de produits à la ferme ou en circuit court doivent être vues comme des opportunités de développement économique à soutenir.

Ce communiqué faisait suite à l’affaire du fromage de Herve au lait cru.

En 2016, après avoir découvert des traces de listeria monocytogène dans le fromage de Herve au lait cru provenant de la ferme du dernier producteur de ce fleuron de la gastronomie wallonne, l’Agence contraignit ce dernier à détruire sa production. Las de la bataille judiciaire qui s’ensuivit et de la mauvaise publicité faite aux produits à base de lait cru,celui-ci finira par cesser son activité.

C’est ensuite à un autre joyau culinaire de Wallonie que s’est attaquée l’AFSCA, la tarte au riz verviétoise en raison de sa conservation à température ambiante, ce qui jusqu’à aujourd’hui n’a jamais posé de problème.

Plus récemment, l’AFSCA a interdit à l’école communale de Clavier de servir aux enfants de la soupe aux légumes frais préparée par une bénévole au motif que les normes sanitaires risquaient de ne pas être garanties.4 Le bourgmestre de la localité est furieux car les légumes sont issus du potager entretenu par les élèves de primaire. Le but pédagogique de la chose ne fait pas de doute, il s’agit ni plus ni moins que d’apprendre aux enfants le bon goût des choses naturelles.

Les soupes industrielles répondraient-elles mieux aux impératifs de sécurité alimentaire ? peut-être, au détriment d’une alimentation saine
et équilibrée sûrement.

En 2014, onze procès-verbaux ont été dressés et 452 avertissements à l’encontre des cantines scolaires ont été émis. Des chiffres supérieurs à l’année précédente au cours de laquelle 10 PV et 426 avertissements avaient été formulés, mais moins de structures inspectées (1296 en 2013 contre 1415 en 2014).5 Bernard Hubien, secrétaire général de l’UFAPEC rapporte :  » Il est déjà arrivé que des parents nous
contactent pour nous dire qu’il n’y avait plus de cantine dans l’école de leur(s) enfant(s) en raison des contrôles de l’AFSCA. Une école de Schaerbeek nous a expliqué avoir complètement remis sa cuisine aux normes deux ou trois ans auparavant, et s’être vue malgré tout dans l’obligation de faire de nouveaux aménagements. Elle a finalement jeté le gant, face aux coûts que cela représentait ! ”

Après la soupe, la tarte au riz, le Herve, ce sont les frigos solidaires qui sont dans le collimateur de l’agence. Celui de Waterloo vient par exemple de se voir privé de 57 kilos de denrées alimentaires périmées. Si les responsables du frigo reconnaissent l’utilité sanitaire des contrôles, ils plaident néanmoins pour plus de souplesse pour ce qui concerne les dates de péremption. « Les députés européens veulent arrêter le gaspillage alimentaire ; en Belgique, on veut que les supermarchés donnent les invendus à des associations… Et on nous empêche de distribuer des aliments qui sont périmés de quelques jours ».6 Sachant que des denrées comme le café, les pâtes, le riz, certaines boissons ont une durée de vie illimitée, il est absurde de les jeter alors qu’elles pourraient être consommées sans aucun risque.

Deux poids deux mesures ?

Alors que l’on semble constater une forme d’acharnement sur des petits producteurs, sur des écoles qui, en toute bonne foi, proposent à
leurs élèves de la soupe faite maison, sur des associations venant en aide aux plus démunis, sur certaines filières les contrôles se font plus « discrets » comme ce fut le cas par exemple dans l’affaire Veviba.

En 2018, l’abattoir Veviba situé sur le site de Bastogne est mis sous le feu des projecteurs pour diverses fraudes à l’étiquetage et à la congélation. Si l’AFSCA déclare avoir procédé au retrait immédiat des rayons des lots incriminés, il n’en reste pas moins que dès septembre 2016, le Kosovo avait donné l’alerte et informé que les dates de péremption avaient été falsifiées et que ce n’est que le 28 février 2018 qu’une perquisition de grande ampleur est menée dans l’entreprise.

Que s’est-il alors passé durant ces deux années ? des denrées impropres à la consommation ont-elles été mises sur le marché sachant que la perquisition a mis à jour des produits congelés depuis 2001 et que sur les 200 palettes contrôlées, 138 étaient non conformes ?

Afin de mettre un terme « à certains « déficits » en matière de contrôle et de transmission de l’information », le ministre de l’agriculture Denis Ducarme, a annoncé, au cours d’un débat en Commission de l’agriculture de la Chambre sur le scandale Veviba, la mise en place de réformes au sein de l’agence. Le ministre lui reproche de n’avoir pas effectué des contrôles plus offensifs compte tenu des informations dont on disposait depuis 2016.

Conclusion

La bonne qualité des aliments que nous consommons doit bien évidemment être une priorité. II appartient à l’AFSCA de traquer sans complaisance toutes les fraudes qui constituent un risque pour notre santé et de révéler les scandales qui entachent certaines filières.

  • Faut-il pour autant sombrer dans une forme d’hygiénisme, d’aseptisation qui aurait pour conséquence de favoriser l’industrie agro-alimentaire
  • responsable de la plupart des grands scandales
    au détriment des petits producteurs ?

Le ministre Carlo Di Antonio estime que les contrôles de l’Agence alimentaire ne sont pas adaptés aux réalités des productions fermières et artisanales et demande une « révision normative » de celle-ci.

Les règles en vigueur entravent le travail des producteurs locaux en faveur d’une alimentation durable et locale en imposant des normes trop exigeantes, appliquées de manière tatillonne et qui nécessitent des investissements énormes que les petits paysans ne sont pas capables de consentir.

Faut-il priver les enfants d’un potage aux légumes frais au motif qu’il n’est pas cuisiné à l’école ?

Faut-il jeter le discrédit sur des denrées qui ont fait la réputation de la gastronomie wallonne et qui n’ont, jusqu’à aujourd’hui, causé aucun dommage ?

Faut-il, alors qu’on nous encourage à lutter contre le gaspillage, envoyer à la poubelle des denrées dont la date de péremption est légèrement
dépassée ?

Un juste milieu doit pouvoir être trouvé entre aspect sécuritaire et possibilité de consommer des aliments naturels peut-être un peu moins contrôlés.

Patricia Keimeul
Directrice FAML

1 http://www.afsca.be/ppa/actualite/belgique/
2 http://www.afsca.be/quefaiton/controlesciblees/
3 https://www.7sur7.be/7s7/fr/1502/Belgique/article/detail/2332274/2015/05/21/L-AFSCA-une-entrave-aux-PMElocales-
et-au-circuit-court.dhtml
4 https://www.rtbf.be/info/regions/detail_clavier-lasoupe-scolaire-preparee-au-domicile-d-une-maman-d-instit-c-est-fini-dit-l-afsca?id=10083027
5 https: //www.r tbf.be/info/belgique/detail_apeine-66-des-cantines-scolaires-ont-eu-un-feu-vert-de-lafsca?id=9177215
6 https://www.sudinfo.be/id88603/article/2018-11-30/lafsca-saisit-57-kg-daliments-au-frigo-solidaire-de-waterloo