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Cours de philosophie et citoyenneté : une histoire, un bilan …

« La citoyenneté, ce n’est pas seulement un ensemble de droits, d’institutions et de pratiques soutenues et interrogées par la philosophie politique. La citoyenneté, ce sont aussi des enjeux et des problèmes qui ne cessent pas d’en faire évoluer les formes et la signification : aujourd’hui, par exemple, le travail, les migrations, les questions de genre, l’écologie ».[1]

Il semblait donc indispensable d’ouvrir l’esprit des élèves à la citoyenneté : les amener à s’interroger chaque jour sur ce qui se passe autour d’eux mais aussi à s’interroger sur eux-mêmes : leurs valeurs et comment arriver à concilier les leurs avec celles des autres pour vivre ensemble de manière harmonieuse. Pratiquer la philosophie pour enfant, permet également aux élèves de structurer leur esprit et de développer les habilités de penser : pour faire de chaque élève un citoyen éclairé et capable d’autonomie dans sa pensée. Des compétences qu’il était donc urgent de développer chez tous les élèves.

De plus, la Belgique était un des rares pays européens à ne pas proposer un cours obligatoire de philosophie durant la scolarité en primaire et secondaire. Ce n’est pourtant pas cette raison qui a poussé les politiques francophones belges à prendre la décision d’en instaurer un d’urgence dans la grille horaire. Si un tel cours était sujet à débat depuis quelques temps, pour Anne Staquet, c’est la pression mise par des parents bruxellois qui voyaient l’obligation de suivre un cours de morale ou de religion comme une violation de la liberté de religion. En 2015, en effet suite à une requête, la Cour constitutionnelle a statué sur le fait que le cours de morale était un cours « engagé » et donc considéré comme non « neutre ». La Fédération Wallonie – Bruxelles, dans l’enseignement officiel, s’est donc vue obligée de proposer une alternative neutre.[2] Qui a pris la forme, pour commencer d’un cours d’EPA ou encadrement pédagogique alternatif, surnommé par beaucoup « cours de rien » et qui a été suivi par  3948 élèves en primaire et 4056 en secondaire. [3]

En octobre 2016, l’EPA a ensuite été remplacé dans l’enseignement primaire par le cours de philosophie et citoyenneté et dans le secondaire il a continué jusqu’en juin 2017. Depuis lors, dans l’enseignement officiel et libre non confessionnel, un cours de philosophie et de citoyenneté est dispensé à raison de l’équivalent d’une heure hebdomadaire en lieu et place d’une des deux heures hebdomadaires du cours de religion ou de morale non confessionnelle.[4] Une deuxième heure, dite de dispense est proposée aux enfants qui ne désirent pas suivre de cours philosophique : morale ou religion.

Ce changement concerne près de la moitié des élèves scolarisés en Fédération Wallonie-Bruxelles. Mais pourquoi cela ne concerne pas tous les élèves en Belgique ?

Voici un petit rappel de l’organisation de l’enseignement en Belgique.

Depuis 1988, l’enseignement n’est plus une compétence fédérale mais bien communautaire. Il existe trois communautés : flamande, francophone et germanophone.

L’enseignement primaire et secondaire est organisé par trois réseaux différents : le réseau officiel qui est géré directement par la communauté, l’officiel subventionné organisé par les communes ou provinces (subventionné car la majorité de ses subventions viennent directement de la communauté dont il dépend). Le troisième réseau scolarise en communauté française près de la moitié des élèves. Il est dit « libre », ses écoles sont créées par des associations privées, principalement catholiques. Ce réseau est également subventionné par les communautés, s’il est libre pour la création de ses écoles et l’organisation de ses cours, il doit se plier à certaines contraintes comme passer les évaluations externes certificatives comme le CEB ou le CE1D par exemple en Communauté française.

Et dans l’enseignement libre confessionnel ?

L’enseignement libre confessionnel refuse de renoncer à une des deux heures hebdomadaires de religion et « opte (finalement) pour une mise en œuvre transversale du référentiel d’Education à la philosophie et à la citoyenneté (EPC) ».[5] Les différentes compétences du socle doivent être mises en œuvre à l’intérieur de différentes disciplines : religion, étude du milieu, sciences, français, éducation plastique et éducation musicale, ainsi qu’au cours d’éducation physique. On ne parle pas ici de cours de philosophie et citoyenneté mais d’une éducation à la philosophie et citoyenneté, ce qui laisse théoriquement le professeur plus libre de la mise en place de son cours même s’il reste tenu de proposer des activités pédagogiques qui répondent aux compétences du socle en la matière.

Qui sont les professeurs du cours de philosophie et citoyenneté ?

Pour limiter les pertes d’emploi, la priorité a été donnée aux anciens professeurs de religion et morale. Tous n’ont pas fait le choix d’accepter des heures du nouveau cours. Pour certains jongler entre les différentes fonctions était jugé trop aliénant, trop complexe ou contre leurs convictions par exemple : porter le voile dans certains écoles et l’enlever dans d’autres. Ceux qui ont renoncé, ont pour certains choisi d’attendre et de voir ce qu’il adviendra d’eux d’ici 2021 mais d’autres, dégoûtés ont quitté l’enseignement.

Certaines conditions ont été exigées pour enseigner ce nouveau cours, disposer d’une formation à la neutralité, d’un diplôme minimum de bachelier avec un titre pédagogique et obtenir le certificat en philosophie et citoyenneté qui a été mis en place seulement en 2017. Dès l’instauration du cours, des mesures transitoires ont été établies pour laisser aux enseignants le temps de se mettre en ordre : si l’inscription à la formation à la neutralité était exigée immédiatement, la réussite de celle-ci et les autres points pouvaient attendre septembre 2021. [6]

L’exigence du diplôme de niveau baccalauréat a d’abord été jugée discriminatoire par les professeurs de religion « car une grande majorité des professeurs de religion ne détiennent qu’un diplôme délivré par les autorités de culte, qui ne permet pas de satisfaire à cette condition. Ils ont introduit un recours devant la Cour constitutionnelle pour faire annuler cette exigence », alors que la grande majorité des enseignants de morale disposaient au minimum d’un baccalauréat.[7]

Le cours est donc actuellement donné par des anciens professeurs de religion (de toutes les confessions) et de morale qui ont été entièrement reconvertis dans ce nouveau cours, d’autres qui jonglent entre différentes casquettes mais aussi par d’autres enseignants qui ont trouvé un intérêt dans ce nouveau cours, qui avaient besoin de changement, de jeunes enseignants qui n’avaient pas de place dans leur discipline et à qui on propose cette fonction ou encore d’autres qui ont vu dans ce cours la possibilité d’être nommé facilement puisque toutes les places y étaient vacantes. Il n’y a donc pas qu’un seul profil de professeur de philosophie et citoyenneté dans l’officiel ou le libre non confessionnel.

Dans l’enseignement confessionnel se sont donc principalement des professeurs de religion qui ont ajouté à leur cours les nouvelles compétences mais d’autres professeurs comme les enseignants de sciences, de français, d’histoire… doivent prendre de temps en temps la casquette de professeur de philosophie et citoyenneté.

L’organisation du cours

Pour insérer le cours dans la grille-horaire, sans augmenter le nombre d’heures de celle-ci (pour des raisons d’organisation et financières), la Fédération Wallonie-Bruxelles a choisi de faire passer le cours de religion ou morale de 2 périodes à 1 période par semaine. La réduction d’heures dans ces disciplines aurait fait perdre inévitablement des emplois. Pour une période de CPC, on pouvait trouver avant jusqu’à sept enseignants. Pour protéger l’emploi, l’exécutif PS-CDH a décidé que les professeurs qui perdent des heures pourront faire de la remédiation ou des heures pour créer des projets et organiser le nouveau cours de philosophie et citoyenneté. Car en effet, beaucoup des professeurs en perte d’heures ne disposaient pas d’un diplôme leur permettant d’effectuer de la remédiation (diplôme obtenu auprès d’un culte). Une telle mesure a un coût : 16 millions ont dû être débloqués (9 pour le primaire, 7 pour le secondaire).[8]

Le Segec (Secrétariat Général de l’Enseignement Catholique) estime que l’officiel bénéficie d’un avantage dont est privé le libre. Si un élève a besoin de remédiation, il aura donc plus de chances d’en bénéficier dans l’officiel que dans le libre sauf si ce dernier compense sur ses fonds propres. Favoriser un réseau par rapport à un autre va à l’encontre de la Constitution belge qui oblige en effet à traiter les réseaux de façon égale, sauf si l’on peut invoquer une « différence objective » qui puisse fonder un traitement inégal. Mais selon le Segec, rien ne justifie qu’il soit privé de cette aide à la remédiation. Même si l’objectif initial n’était pas de donner de l’aide aux écoles mais bien de maintenir l’emploi des professeurs de cours philosophiques et que s’il avait réellement mis en place le cours, il aurait lui aussi bénéficié de cette mesure.

Dans leur requête, les avocats du Segec – Michel Kaiser et Marc Verdussen – estiment que ces différences s’amenuisent au point de ne plus pouvoir fonder de traitement inégal. A cela, la Fédération Wallonie-Bruxelles a répondu que l’objectif n’était pas de rendre une telle organisation pérenne et qu’une telle mesure devait s’annuler d’elle-même avec les départs (à la pension ou autres) d’autres enseignants ou avec la création naturelle de périodes de cours suite au boom démographique.[9]

Cependant, le Segec estime que l’avantage serait à la fois non conforme à la Constitution mais qu’il serait en plus exagéré et demandait soit de bénéficier des mêmes avantages soit que les autres pays réseaux n’en bénéficient plus.

L’organisation du cours dans le réseau libre confessionnel catholique

« La dynamique du programme de religion reste première ? .Le cours de religion catholique est, par la nature de son programme un cours qui contribue fondamentalement à l’éducation citoyenne. Il ne s’agira donc pas d’une révolution copernicienne, loin de là ! »[10] Les choses sont claires, les écoles de ce réseau ne vont pas modifier leur fonctionnement par rapport à avant. L’instauration d’une éducation à la philosophie et la citoyenneté ne serait qu’un leurre dans le libre confessionnel ?

La formation

La décision de mettre en place le cours EPC a été prise dans l’urgence, il a donc fallu rédiger un référentiel au plus vite. Si les professeurs ont pu le consulter avant la rentrée, aucun d’entre eux n’avait été vraiment formé pour enseigner le cours. Seulement une courte formation avait été mise en place mais elle ne faisait qu’effleurer ce nouveau référentiel. Il a donc fallu attendre 2017 avec la mise en place du certificat à la philosophie et citoyenneté dispensé dans différentes hautes écoles et universités de Belgique. La formation devait être accessible jusqu’à l’année scolaire 2020-2021 pour permettre à tous les enseignants des mesures transitoires de se former mais faute de participants différents lieux de formation ne la dispenseront pas pour la dernière année. Parallèlement, les instituteurs primaires en formation peuvent prendre l’option philosophie et citoyenneté.

Les conditions pour participer à la formation sont strictes mais pas toujours comprises de la même manière par tout un chacun. Les enseignants (prioritairement dans les mesures transitoires) doivent prester une période de philosophie et citoyenneté dans leur horaire.

Afin de pouvoir réaliser la formation qui est dispensée en dehors des heures d’enseignement : soirée, mercredi après-midi ou week-end : « (…) deux périodes sont octroyées lors de chaque année scolaire (durant quatre ans) à tout professeur du cours de philosophie et de citoyenneté, et ce, jusqu’au 30 juin 2021. Pendant ces périodes, le membre du personnel est dispensé de donner cours afin de pouvoir suivre la formation pour obtenir le certificat en didactique du cours de philosophie et de citoyenneté. Il bénéficie dès lors d’une mesure qui s’apparente à un congé-éducation, même s’il a obtenu le certificat ».[11]

Ainsi, un enseignant du primaire devait donner 22 heures de cours au lieu des 24 heures habituelles. Un tel « cadeau » qui a été critiqué par le Segec « car cette mesure serait discriminatoire, dès lors que l’enseignement libre est également tenu d’organiser une éducation à la philosophie et à la citoyenneté sans disposer d’aucun moyen pour assurer une formation des enseignants à cette fin ». [12]Suite au recours en annulation partielle du décret de la Communauté française du 19 juillet 2017 « relatif à la mise en œuvre d’un cours de philosophie et de citoyenneté dans l’enseignement secondaire et portant diverses adaptations dans l’enseignement fondamental », introduit par l’ASBL « Secrétariat Général de l’Enseignement Catholique en Communautés française et germanophone », cet avantage est supprimé et perd ses effets pour les enseignants en septembre 2020. Les professeurs vont donc devoir prester leur horaire complet.

S’agissait-il d’une véritable injustice pour les enseignants du libre confessionnel ? Il ne leur a pas été imposé de suivre cette formation de 30 crédits sur leur temps personnel et sans revalorisation salariale. 30 crédits correspondent à l’équivalent d’une demi-année universitaire ou en haute école, cela correspond au même volume d’heures que l’agrégation à l’université. Peut-on à la fois ne pas jouer au loto et se plaindre de ne pas avoir gagné ? La formation était certes utile et beaucoup d’enseignants l’ayant suivie sont finalement contents mais, il est certain que celle-ci a eu un impact sur la vie personnelle des enseignants tant organisationnel, qu’au niveau de la fatigue ressentie sur cette charge supplémentaire. Si ce cadeau n’est retiré que pour la dernière année, il ne semble pas « juste » de changer les règles en cours de jeu pour satisfaire ceux qui ont refusé de participer. Certains enseignants qui pour des raisons personnelles auraient reporté à cette dernière année leur formation (ce qu’ils avaient légalement le droit de faire) se retrouveront peut-être empêchés de la réaliser et perdront leur droit à enseigner le cours dès l’année prochaine ou devront s’inscrire à une formation à plus de 100 kilomètres de chez eux.

L’école des fans ?

Des formations ont été organisées dans différentes hautes écoles, universités ou écoles de promotion sociale. Un même certificat mais des formations avec des exigences et un contenu fort différents. Certains enseignants ont eu le triste sentiment d’avoir reçu ce certificat dans une pochette surprise sur simple participation, d’autres ont dû beaucoup donner d’eux-mêmes pour recevoir le précieux sésame. Une formation que beaucoup espéraient exigeante tant parce qu’ils étaient en recherche d’apprentissages fondamentaux que pour revaloriser une fonction bien que nouvelle qui avait déjà perdu toute son prestige avant même que le cours débute suite au battage médiatique qui a eu lieu autour du cours.

Si les formations étaient fort différentes, cela peut simplement refléter les nombreuses possibilités de dispenser le cours. Un grand nombre d’enseignants ont vu leur manière d’envisager le cours tout à fait modifiée suite aux interventions des formateurs. D’autres n’ont probablement rien appris car leur formation initiale les avaient bien préparés, d’autres car ils n’étaient pas prêts à se remettre en question comme c’est le cas pour les enseignants dans toutes les matières. Après l’obtention du certificat, les enseignants du primaire se retrouvent assez seuls, il y a très peu de formation en cours de carrière spécifiques à la philosophie et citoyenneté. Alors qu’il s’agit d’un cours pour lequel il faut tout particulièrement se remettre sans cesse en question aussi bien en tant qu’élèves qu’en tant qu’enseignant.

Il y a probablement d’excellents professeurs et des médiocres mais est-ce l’apanage de ce cours ?

Dans l’enseignement libre confessionnel, aucune formation supplémentaire n’a été exigée. Les professeurs ont donc été formés (ou non) selon la volonté de l’école, du pouvoir organisateur, ou par volonté personnelle. Si on interroge certains professeurs, ils n’ont rien changé à leurs pratiques : pas le temps, pas d’intérêt pour le sujet, déplorant ne pas avoir été formés convenablement pour le faire, et pour certains même pas au courant que leur cours devait inclure de nouvelles compétences.

Des enseignants vraiment neutres ?

Difficile de répondre à la question. Il faudrait s’interroger sur la question de ce que signifie vraiment être neutre. Peut-on seulement l’être ? Si on peut espérer que les cours préparés par ses anciens professeurs de morale et de religion le sont. Qu’en est-il lorsque les élèves posent des questions qui concernent des sujets parfois tabous pour la religion comme l’avortement ou l’homosexualité? Pas besoin d’être un ancien professeur de religion pour avoir des convictions religieuses, ou d’être athée pour être professeur de morale diront certains à juste titre. Un tel cours amène cependant des questions auxquelles il n’est pas toujours facile de répondre en faisant fi de ses propres convictions. La formation permet d’apprendre à faire un rappel à la loi sans prendre position puisque ce n’est pas le rôle de l’enseignant. Jusqu’où peut-on laisser un élève aller dans ses propos sous couvert de sa liberté de pensée et d’expression, ce sont des questions que les enseignants de philosophie et citoyenneté sont souvent amenés à se poser.

Une inspection garante de cette neutralité ? Actuellement, elle n’existe pas à proprement parlé. Il y a eu quelques visites dans des classes pour aider les professeurs mais ces rencontres n’avaient aucune intention de sanctionner mais bien d’aiguiller les professeurs et aux « inspecteurs » de se faire une idée de la réalité du terrain.

« Pour l’instant, en tant qu’enseignante de ce cours je n’ai jamais été inspectée ni par le PO, ni par ma direction, ni par la Communauté française. Les cours des élèves restent à l’école. Aucun autre adulte n’a donc eu un regard extérieur sur le cours dispensé. J’essaie de faire mon travail avec le plus de souci conscience professionnelle possible et je veille à rester neutre. Mais est-on capable de juger de sa propre neutralité ? J’enseigne la pluralité des valeurs mais mes propres convictions ne transparaissent-elles pas parfois dans mon discours sans que je m’en rende compte ? ». Une grande liberté qui pourrait inquiéter certains parents.

Une neutralité si importante dans le cours de philosophie et citoyenneté est-elle présente dans une éducation à la philosophie et à la citoyenneté dispensé par un professeur de religion ou autre dans l’enseignement libre confessionnel ? La réponse est non, parce que même s’ils sont capables d’exposer différents points de vue à propos d’un sujet sociétal ou philosophique, ils sont soumis aux normes de leur pouvoir organisateur orientant la pensée de leurs élèves en fonction des fondements propres à leur religion.

Pour conclure

Le cours de philosophie et citoyenneté a beaucoup de potentiel et permet aux enseignants de mettre en place des projets intéressants qui vont permettre aux élèves de devenir progressivement des citoyens participatifs, dotés d’esprit critique. Pourtant, on a pu voir que ce cours a souvent peu de crédit auprès des autres enseignants et du grand public. La ou les causes ? Les décisions politiques : instaurer un cours pour lequel les enseignants ne sont pas formés, le choix de donner priorité à d’anciens professeurs de religion et de morale, des fonctions qui avaient perdu tout crédit, l’organisation chaotique, les guerres entre réseaux ? Un peu de tout ? Probablement. Est-ce que cette fonction pourra gagner ses lettres de noblesse ? Le cours va-t-il passer à deux heures  et rendre les cours de religion et de morale facultatifs ? Etre dispensé par les enseignants eux-mêmes en primaire ? La formation des élèves issus de l’officiel et du libre non confessionnel sera-t-elle équivalente à la fin des études. Autant de questions auxquelles seul le temps nous permettra de répondre.

Marie Béclard
FAML

  1. Informations consultées le 8 juillet 2020 sur le site https://www.news.uliege.be/cms/c_9458438/en/le-cours-de-philosophie-et-citoyennete-une-occasion-en-or#:~:text=La%20citoyennet%C3%A9%2C%20ce%20sont%20aussi,%2C%20l’%C3%A9cologie…
  2. A. STAQUET, « Comment le fait d’associer philosophie et citoyenneté modifie la conception de la philosophie et vice versa ? » dans Diotime, n°83 (01/2020), consulté le 10 juillet 2020 sur le site http://www.educ-revues.fr/DIOTIME/AffichageDocument.aspx?iddoc=113549
  3. Informations consultées le 10 juillet 2020 sur le site https://www.rtbf.be/info/regions/detail_mais-qu-est-devenu-le-cours-de-rien?id=9325070
  4. Informations consultées le 10 juillet 2020 sur le site https://www.gallilex.cfwb.be/document/pdf/41979_000.pdf
  5. Informations consultées le 10 juillet 2020 sur le site http://enseignement.catholique.be/segec/fileadmin/DocsFede/FESeC/religion/2018/EPC-au-cours-de-religion.pdf
  6. X. DELGRANGE, « La Belgique francophone accouche douloureusement d’un cours de philosophie et citoyenneté non désiré par tous. » dans Revue des religions, 5, mai 2018, p. 122.
  7. X. DELGRANGE, « La Belgique francophone accouche douloureusement d’un cours de philosophie et citoyenneté non désiré par tous. » dans Revue des religions, 5, mai 2018, p. 121.
  8. Informations consultées le 12 juillet 2020 sur le site https://pepcasbl.wordpress.com/
  9. P. BOUILLON, « L’école catholique attaque le décret du cours de philosophie et citoyenneté » dans Le Soir mis en ligne le 6/12/2016 sur https://www.lesoir.be/art/1384752/article/actualite/belgique/politique/2016-12-06/l-ecole-catholique-attaque-decret-du-cours-philosophie-et-citoyennete
  10. Informations consultées le 08 juillet 2020 sur le site http://enseignement.catholique.be/segec/fileadmin/DocsFede/FESeC/religion/2018/EPC-au-cours-de-religion.pdf
  11. Arrêt n° 51/2020 du 23 avril 2020 consulté le 12 juillet 2020 sur le site https://www.const-court.be/public/f/2020/2020-051f.pdf?fbclid=IwAR3wSDG54RadeSDt9rPqXGQnqenzAGUPNQEZoHtTSnT_310CjjPmkBQ5Cmo; p.8.
  12. Arrêt n° 51/2020 du 23 avril 2020 consulté le 12 juillet 2020 sur le site https://www.const-court.be/public/f/2020/2020-051f.pdf?fbclid=IwAR3wSDG54RadeSDt9rPqXGQnqenzAGUPNQEZoHtTSnT_310CjjPmkBQ5Cmo

 

Nouvelle présidence du CAL – Le mot du Past-Président

Chère Véronique,

Chères amies, chers amis,

Mon mandat de président a pris fin. Je m’adresse à vous pour souligner une dernière fois, bénévoles et permanents, l’immense travail que vous accomplissez.

Le mouvement composé d’hommes et de femmes sincèrement attachés à nos valeurs de liberté, d’égalité et de solidarité agit, débat, bouscule, innove, transgresse et propose à travers ses associations, ses régionales et le CAL communautaire. Militants, nous savons que rien n’est acquis. Que la réalisation de l’idéal laïque exige rigueur, détermination et persévérance.

À chacune et chacun, merci.

Au cours des six dernières années, les chantiers furent nombreux.

Relevons parmi ceux-ci, la défense des migrants. Étrangers voyageurs méprisés en dignité et traités de façon injuste. Fiers de nos actions solidaires, de nos revendications pour la régularisation de leur situation, premiers à nous opposer au projet des visites domiciliaires, souvenons-nous que la solidarité n’est pas un crime, mais un devoir.

Épinglons notre combat permanent pour l’égalité des hommes et des femmes. Pour le plein exercice de leurs droits. Pour un féminisme universaliste. Pour une dépénalisation de l’interruption volontaire de grossesse. La législation évolue et nous y contribuons largement.

Les plus vulnérables, les plus démunis, les détenus ou encore les toxicomanes ont aussi occupé le cœur de nos préoccupations. C’est que la dignité humaine ne s’accommode pas de situations où les droits fondamentaux seraient moins accessibles à certains qu’à d’autres.

Quant à ceux qui font choix de mourir dans le respect de leur dignité, ils ont plus que jamais pu compter sur notre soutien. Les conditions de la mort peuvent résulter d’un choix de vie. Pas à pas, nos propositions font adhésion.

L’instruction et le partage des savoirs sont un vecteur essentiel de liberté et d’égalité.  Le moyen pour chacun de s’émanciper. De participer à la construction d’un destin individuel et collectif. Le programme de deux heures de cours d’éducation à la philosophie et à la citoyenneté obligatoires dans l’enseignement fondamental franchit progressivement les obstacles. Il illustre parfaitement notre aspiration à vivre libres, ensemble.

Porteurs d’un projet de société, nous le clarifions désormais par notre définition de la laïcité, principe humaniste qui fonde le régime des libertés et des droits de l’Homme sur l’impartialité du pouvoir civil démocratique dégagé de toute ingérence religieuse.

Nous postulons qu’elle oblige l’État de droit à assurer l’égalité, la solidarité et l’émancipation des citoyens par la diffusion des savoirs et l’exercice du libre examen.

Ainsi fallait-il, outre nos publications nous réapproprier le contenu, la direction, la responsabilité de nos émissions concédées et élargir nos communications aux nouveaux réseaux sociaux. Ce fut réalisé avec brio par nos nouvelles équipes.

Ainsi fallait-il nous battre pour replacer le principe de laïcité au centre de nos démocraties et sa reconnaissance en préambule ou au cœur de la loi fondamentale, de la Constitution. Nous avons porté le débat au Sénat et les travaux parlementaires s’en firent largement l’écho.

Ainsi fallait-il, à l’occasion du 50ème anniversaire du Centre d’Action Laïque oser un appel universel à l’adresse des autorités publiques de tous les continents. Les inviter à affirmer leur adhésion à ce principe considéré comme une exigence démocratique essentielle et défendre son inscription dans les Constitutions nationales et les traités internationaux.

Tout cela fut rendu possible et réalisé grâce à votre engagement. Et puisque je ne puis vous citer tous, permettez-moi de vous représenter à l’image de notre Secrétaire Général.

Jean De Brueker, par sa compétence et sa connaissance du mouvement, sa disponibilité et sa fraternité éclairée, a assuré la cohésion des équipes, la synergie des travaux, l’assistance aux associations et la mise en œuvre effective des orientations et décisions du bureau et du conseil d’administration.

Jean nous quittera dans quelques semaines. Il laissera sur place de remarquables directions et l’excellent duo composé de Benoît Vandermeerschen  et Hervé Parmentier.

En d’autres circonstances nous aurions pris davantage plaisir à exprimer et partager notre joie et la satisfaction du travail accompli.

Les temps difficiles du confinement ne l’auront pas permis. Temps difficiles que nous avons néanmoins la chance de vivre en démocratie, en un pays, chose unique au monde, qui subsidie l’assistance morale et la laïcité.

L’appel de Liège était prémonitoire. À la solidarité politique, éthique, humaine et climatique s’ajoute aujourd’hui la prise de conscience d’une nécessaire dépendance sanitaire à l’échelle Universelle. L’Humanité se fait une et de moins en moins divisible. Sans doute assistons-nous aux premiers balbutiements d’une révolution anthropologique plutôt qu’idéologique.

Ainsi, si les Cassandre le disputent actuellement aux messies, il me plait de citer l’historienne Françoise Hildesheimer qui propose plutôt de mesurer l’impact des épidémies aux changements que leur disparition engendrent.

« La disparition de l’épidémie, à partir des années 1772, pour la France, est un phénomène majeur de l’histoire de la peste (…) Quand la maladie est devenue une simple possibilité au lieu d’être une quotidienne réalité, il est devenu possible de raisonner à son endroit et à la raison de triompher de l’irrationnelle maladie avant que la science n’apporte des connaissances valables.

L’importance de la cessation de la peste ne se situe pas seulement en ce domaine : elle affecte également la démographie, l’économie, les relations sociales, à tel point (…) que sa cessation a eu au moins autant d’importance que sa durable présence, en permettant un renversement de conjoncture en tous domaines.

À partir du moment où elle a cessé, le règne du bonheur et du progrès a été à l’ordre du jour des Lumières et le développement démographique a été ininterrompu. ».

Chers amis, chères amies, je suis heureux de passer le flambeau laïque à une femme remarquable, d’accueillir en notre nom à tous notre nouvelle (et première) présidente Véronique De Keyser dont les qualités contribueront à relever ces défis qu’annonce la fin prochaine de la pandémie.

Bonjour et bonne santé à tous,

Henri Bartholomeeusen

Waterloo, le 26 mai 2020